La maladie d’Alzheimer est une maladie neurodégénérative à ce jour irréversible. Prédire sa survenue le plus tôt possible est une priorité dans la mesure où cela permettra de prescrire le plus tôt possible des médicaments lorsqu’ils seront sur le marché afin de freiner sa progression. De nombreuses études épidémiologiques ont eu pour but d’identifier les facteurs de risques prédictifs les plus pertinents. Aujourd’hui, un nouvel outil est à disposition des chercheurs pour poursuivre les découvertes : l’intelligence artificielle et notamment le « machine learning » associé à la création de « réseaux de données complexes ». Ces méthodes de traitement de l’information par la modélisation apporte de nouvelles pistes pour le diagnostic et la prise en charge précoce des malades.
/ De l’importance du suivi des données médicales
Les dossiers médicaux, en particulier sous format électronique, sont des sources de données médicales très riches qui peuvent faciliter la compréhension des maladies complexes et aussi leur prédiction. Les données recueillies lors des rendez-vous médicaux peuvent être de plusieurs natures, par exemple les données démographiques, les données cliniques, les données biologiques, et les données d’imagerie. Toutes ces informations collectées à différents temps dans la vie d’un individu et par différents professionnels de santé doivent être organisées pour suivre l’histoire du patient et construire une médecine plus personnalisée. Quand ces approches sont réalisées à grande échelle sur des millions de patients ou d’individus, elles permettent d’identifier des signaux faibles associés au développement de maladies de façon précoce. Grâce à l’intelligence artificielle à même de gérer d’aussi grands volumes de données, il est désormais possible d’analyser ces bases de données gigantesques qu’on a coutume d’appeler, « big data ».
/ L’intelligence artificielle au service de la recherche
En effet, l’intelligence artificielle, qui utilise des ordinateurs avec des capacités de calcul très puissantes, est un outil extrêmement prometteur pour la recherche en santé. Parmi les méthodes qui existent, il y a le « machine learning » ou apprentissage automatisé pour la reconnaissance de « motifs » au sein des groupes de données. Dit autrement, ces motifs sont des « évènements ou phénomènes » qui se répètent au sein de ces groupes de données.
Aujourd’hui, par le biais de l’intelligence artificielle, l’objectif est donc d’identifier des motifs récurrents dans les données collectées auprès de millions d’individus et de relier toutes les informations de différentes natures entre elles. Cela permet par exemple d’identifier et de classer des facteurs prédictifs cliniques d’une maladie pouvant avoir une signification sur le plan biologique ouvrant ainsi de nouvelles hypothèses de diagnostic et de traitements.
/ Prédire la maladie d’Alzheimer grâce à l’intelligence artificielle
Dans une étude américaine récente réalisée à San Francisco et utilisant des bases de données médicales très vastes (examens cliniques, données génétiques et de neuroimagerie), des chercheurs ont pu démontrer toute la puissance de l’intelligence artificielle, et en particulier la modélisation informatique, pour prédire la maladie d’Alzheimer. L’analyse des 749 patients Alzheimer et 250 545 individus contrôles a permis d’entrainer des machines à la reconnaissance de motifs communs mais aussi de créer des outils automatisés pour extraire les facteurs prédictifs les plus pertinents. Les résultats de ces travaux indiquent que parmi les facteurs prédictifs précoces de la maladie d’Alzheimer, on retrouve l’hypercholestérolémie, l’ostéoporose et la dépression sévère. Ces facteurs sont par ailleurs prépondérants chez les femmes en comparaison avec les douleurs thoraciques, la perte d’audition et l’hyperplasie de la prostate qui sont des facteurs prédictifs prépondérants chez les hommes. Qu’en est-il des déterminants biologiques en lien avec ces manifestations cliniques ? Pour répondre à cette question, les chercheurs ont étudié les associations qui existaient entre les données cliniques et les données génétiques. Ils ont montré, par exemple, que le gène ApoE est très clairement associé à l’hypercholestérolémie. Moins connu que l’observation précédente, il existe une association entre le gène MS4A6A et l’ostéoporose, en particulier chez la femme.
Ces nouveaux moyens d’analyse et de traitement des données de santé représentent aujourd’hui un atout important pour mieux comprendre la maladie d’Alzheimer mais aussi pour améliorer son diagnostic et sa prise en charge. Prédire la maladie le plus tôt possible c’est aussi permettre la mise en place la plus précoce d’une prise en charge thérapeutique adaptée lorsqu’elle sera enfin disponible.
Source : JAMA