Mon proche présente les premiers signes d’Alzheimer : quelles démarches juridiques entreprendre ?

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Les premières étapes à suivre lorsqu’un proche montre des signes de la maladie d’Alzheimer, les consultations juridiques, et la mise en place des mesures de protection adaptées.

La maladie d’Alzheimer est une maladie neurodégénérative évolutive qui affecte les capacités cognitives d’une personne. Sa capacité volitive va peu à peu s’altérer jusqu’à parfois disparaitre. Il viendra alors un temps où, dans l’impossibilité de prendre une décision ou d’exprimer une volonté cohérente, une mesure de protection judiciaire devra être mise en place pour permettre à un proche ou un professionnel (selon les circonstances) d’agir en son nom, de la représenter dans la gestion de son patrimoine mais également dans la réalisation d’acte personnel.

N’y a-t-il rien d’autre à faire ? Si la maladie s’installe, le passage devant le juge des contentieux de la protection (nouveau nom du juge des tutelles) est-il une fatalité ?

/ Agir lorsqu’il est encore temps

Tout va dépendre de la capacité de la personne à prendre une décision. En effet, si son état la rend incapable de s’exprimer et de faire valoir une volonté éclairée alors le prononcée d’une mesure de protection par un juge semble inévitable. Si à l’inverse, elle peut encore décider pour elle-même, elle a alors la possibilité d’anticiper sur le futur et de mettre en place des dispositifs subsidiaires à une mesure de protection qui éviteront la saisine du juge.

/ Le jeu des procurations

C’est certainement l’outil le plus simple et le plus rapide à mettre en place et qui permettra de pallier l’urgence d’une situation. Une procuration bancaire assouplira la gestion du quotidien. Il serait en effet possible pour votre mandataire (la personne à qui vous avez donné procuration) de payer vos factures et de s’assurer de votre bien-être financier. Il pourrait alors, par exemple, s’acquitter en votre nom des frais de séjour dans un établissement d’hébergement spécialisé si votre maintien à domicile ne s’avérait plus possible.  

Si vous souhaitez aller plus loin et confier à un tiers de confiance le pouvoir d’accomplir en votre nom les actes de gestion courantes également appelés actes d’administration, adressez-vous à votre notaire qui vous conseillera dans la rédaction d’une procuration générale.

Attention cependant, une procuration générale d’administration ne permet pas la délégation d’acte de disposition. Ainsi, vous ne pourrez pas autoriser le mandataire à vendre votre maison ou à clôturer une assurance-vie à votre nom. Ces opérations appellent un mandat spécial que vous ne serez peut-être plus alors en capacité de donner.

De plus, ce simple jeu de procuration intéresse exclusivement la gestion des biens et exclut la protection de la personne.

/ Le Mandat de Protection Future (MPF)

C’est le dispositif d’anticipation par excellence. Il est apparu dans notre législation avec la loi réformant la protection juridique des majeurs du 5 mars 2007 et est applicable depuis le 1er janvier 2009.

C’est tout simplement le recueil de vos volontés que le législateur vous invite à mettre sur papier dans l’éventualité où vous n’auriez plus la capacité de les exprimer valablement. Ce n’est ni plus ni moins un « testament de vie » qui à l’inverse des dernières volontés ne dispose pas de votre patrimoine à votre mort mais organise la protection de vos biens et/ou de votre personne alors que vous êtes toujours bien vivant mais malheureusement empêché par la maladie ou un accident de la vie.

Toute personne majeure peut, devant notaire ou par acte sous seing privé, rédiger son Mandat de Protection Future. Cependant, on l’aura compris, s’agissant d’un “contrat”, elle doit avoir la capacité de le faire. Il est donc conseillé aux personnes pour qui la maladie d’Alzheimer vient d’être diagnostiquée, d’assurer la validité de leur mandat par la production d’un certificat médical attestant de leur état au moment de la signature de l’acte.

Vous pouvez ainsi donner mandat à un ou plusieurs tiers de confiance, des personnes de votre famille par exemple ou des amis très proches. Multiplier raisonnablement les mandataires permet de pallier l’éventuelle absence de l’un d’eux le jour où il faudra activer le Mandat de Protection future.

En effet, un Mandat de Protection Future se construit et prend effet en deux temps bien distinct. D’abord la rédaction du mandat alors que le mandant est en pleine capacité. Ensuite, alors que la maladie avance et que le mandant ne peut plus gérer seul ses affaires, le mandataire, après avoir fait intervenir un médecin agréé qui constatera les difficultés cognitives de la personne, activera auprès du tribunal le Mandat de Protection Future. On notera donc qu’un temps plus ou moins long peut intervenir entre la rédaction du mandat et son activation, temps pendant lequel le mandataire que vous aviez désigné pourrait lui-même être empêché. Il est donc primordial de déterminer une solution de remplacement.

La loi vous autorise également à désigner un Mandataire Judiciaire à la Protection des Majeurs, les seuls professionnels agréés autorisés à gérer un Mandat de Protection Future.

Le Mandat de Protection Future est une” super procuration” qui, à l’inverse des dispositifs que l’on a évoqués plus haut, permet bien évidement la gestion des actes d’administration mais également ceux de disposition (à la condition que vous rédigiez votre mandat avec l’assistance d’un notaire). Ainsi, plus de difficulté pour envisager la vente d’une partie ou de la totalité de votre patrimoine en cas de nécessité et selon les conditions que vous aurez déterminées. Vous pourrez ainsi à loisir autoriser par exemple votre mandataire à vendre un terrain ou un bien de rapport vous appartenant pour financer votre accueil dans un établissement spécialisé.

/ Le mandat de Protection Future et la protection de la personne

Ce qui rend le Mandat de Protection Future très attractif, c’est aussi la possibilité de désigner un tiers (pourquoi pas le même mandataire que pour la gestion des biens) pour vous représenter dans la protection de votre personne selon les contours déterminés par le Code civil. Ainsi, ce mandataire à la protection de la personne sera destinataire de toutes informations de santé vous concernant, pourra participer à la décision médicale en vous assistant et même, dans le cas où vous n’en auriez plus la capacité, vous représenter et consentir à votre place sur les traitements ou interventions nécessaires.

/ Quand il est malheureusement trop tard

Si aucune mesure d’anticipation n’a été prise ou si elles s’avèrent insuffisantes à protéger correctement la personne malade, une seule solution : la saisine du juge des contentieux de la protection pour la mise en place d’une mesure de protection judiciaire.

En effet, il va être nécessaire de se substituer à la personne malade pour agir à sa place et prendre des décisions la concernant. Seul un juge peut organiser ce transfert de capacité en désignant un protecteur, qu’il soit curateur, tuteur ou habilité.

La procédure est la même quelle que soit votre demande. En premier lieu et sous peine d’irrecevabilité, il faut aller chercher un certificat médical circonstancié d’un médecin inscrit sur la liste du procureur de la République. Ces professionnels adoubés par les services du parquet sont les seuls à pouvoir apprécier médicalement la nécessité d’une mesure de protection et donc vous permettre de saisir le juge des tutelles.

Une fois le sésame en main, vous pouvez compléter la requête (facilement téléchargeable sur internet) et y joindre les justificatifs demandés. Vous serez à terme, ainsi que toutes les personnes intéressées, convoqué pour une audition au tribunal. À la suite de cet entretien, le juge prendra sa décision. Il ordonnera ou non une mesure de protection qu’il adaptera à la situation de la personne à protéger et désignera un protecteur. Il pourra s’agir d’un membre de la famille ou d’un proche. Toutefois, il arrive que le juge, selon les circonstances d’espèce, désigne un professionnel pour prendre en charge les intérêts de la personne vulnérable.  

Attention, une demande de mise sous protection est une procédure longue. Selon le Code de procédure civile, le magistrat a un an pour prendre sa décision. Généralement, le dossier est finalisé au bout de 6 à 8 mois.  

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