Alors que la recherche sur les méthodes de prévention de la maladie d’Alzheimer progresse, une question clé se pose : comment pouvons-nous utiliser les connaissances scientifiques pour mieux protéger notre santé cognitive ? La Fondation Alzheimer a eu l’honneur d’interviewer le Dr Philippe de Souto Barreto, dont les travaux de recherche ont révélé l’importance cruciale de l’activité physique dans la lutte contre cette maladie.
/ Rencontre avec le Docteur Souto Barreto
Spécialiste reconnu en gériatrie, le Dr de Souto Barreto a montré comment un mode de vie actif peut non seulement améliorer le bien-être général, mais aussi jouer un rôle essentiel dans la réduction des risques de déclin cognitif. Au cours de cette interview, il partagera ses conclusions sur les effets bénéfiques de l’exercice physique sur la santé du cerveau, et expliquera pourquoi il est crucial d’intégrer le sport dans notre quotidien pour prévenir la maladie d’Alzheimer.
Pourriez-vous présenter : votre parcours et vos fonctions actuelles ?
Je m’appelle Philipe de Souto Barreto, je suis diplômé d’une licence en STAPS (obtenue au Brésil), d’un Master sur exercice physique et santé (en Espagne), d’un Master 2 en Anthropologie Bioculturelle (à Marseille, France) ainsi que d’un doctorat en Anthropologie Bioculturelle. Je suis arrivé au Gérontopôle de Toulouse en 2012 en tant que post-doctorant.
Actuellement, je suis Professeur à l’Université Toulouse 3 Paul Sabatier, affilié à l’UMR 1295 CERPOP (Inserm/UPS), membre de l’IHU HealthAge de Toulouse et Editor-in-Chief de la revue internationale Journal of Nutrition, Health & Aging.
Quels sont vos objectifs de recherche ?
Mes travaux de recherche portent sur la perte de capacité intrinsèque, c’est-à-dire l’ensemble des capacités physiques et mentales, dont la cognition, au cours du vieillissement ainsi qu’à l’influence de la pratique d’une activité physique sur le ralentissement du déclin de cette capacité intrinsèque. De manière globale je m’intéresse à la question de l’efficacité de la prévention des maladies du vieillissement par le biais de la pratique d’une activité physique et je tente de développer cette approche là auprès de personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer.
Dans une approche préventive, l’activité physique joue un rôle crucial en favorisant la plasticité cérébrale et en ralentissant la neurodégénérescence. Elle impacte également d’autres processus liés au vieillissement, tels que l’inflammation chronique et les dysfonctionnements mitochondriaux. Cette approche s’inscrit dans le cadre de la Géronscience, qui explore comment les maladies liées à l’âge, comme la maladie d’Alzheimer, sont influencées par le vieillissement biologique. En ralentissant ce processus biologique par une activité physique régulière, il est possible de prévenir et de réduire la gravité des maladies liées à l’âge.
Quels sont vos résultats les plus marquants de vos travaux sur les bienfaits de l’activité physique pour lutter contre la maladie d’Alzheimer ?
La pratique régulière d’une activité physique permet de réduire le risque de développer une maladie d’Alzheimer ou maladie apparentée. Nos recherches montrent que les personnes âgées de plus de 70 ans qui sont physiquement actives présentent une épaisseur corticale plus importante que celles qui sont moins actives. L’activité physique influe sur le processus de neurodégénération, affectant ainsi la fonction cognitive en interagissant avec des mesures comme le volume cérébral, l’hippocampe et les marqueurs sanguins tels que les neurofilaments. Nous avons aussi observé que le biomarqueur GDF-15, lié au vieillissement et au déclin cognitif, est influencé par l’activité physique. Nos travaux suggèrent que l’exercice peut prévenir le déclin cognitif et la maladie d’Alzheimer en favorisant la plasticité cérébrale et en ralentissant le vieillissement biologique. Bien que nous n’ayons pas encore confirmé d’effets directs de l’activité physique sur des biomarqueurs spécifiques de la maladie d’Alzheimer, comme la protéine tau phosphorylée, il est possible que des études plus longues révèlent de telles relations.
Avez-vous un conseil à partager avec nos lecteurs ?
Mon principal conseil est que l’activité physique est essentielle pour un vieillissement en bonne santé, offrant une protection contre la perte de fonction, y compris le déclin cognitif. Bien que l’OMS recommande au moins 150 minutes d’activité physique par semaine, de nombreuses études montrent que toute quantité d’exercice est préférable à aucune et offre des bénéfices pour la santé. En résumé, toute activité physique est meilleure que l’inaction, et plus vous êtes actif, plus vous bénéficiez de ses effets positifs sur la santé, y compris cognitive.